lundi 10 novembre 2008

DEUX ARTISTES - DEUX VISIONS


Vous êtes-vous déjà demandé pourquoi un dessin ou la peinture d'une scène diffère tellement d'une photo ?

Un jour, mon ami Yvon et moi étions à croquer la même scène, assis l'un à côté de l'autre. Une demi-heure plus tard, nous avons comparé nos dessins. Tous deux travaillions le même motif et pourtant le résultat n'était vraiment pas le même. Et ce n'est pas tout, nos deux croquis étaient totalement différents d'une photo prise quelques jours plus tard. Pourquoi ?

Voici quelques-unes de mes observations.

Le centre d'intérêt. Pour ma part, c'est la forme triangulaire de la fenêtre au haut à droite et l'effet occasionné par l'ombre qui ont attiré mon attention. Yvon, de son côté, a débuté son travail à partir du niveau de la rue. Sa vision partait d'en bas pour se diriger vers le haut. La caméra, quant à elle, a été incapable de sélectionner certains éléments comme le font les artistes. La photo a capté tout de manière identique. Quant à nous, le fait de donner de l'emphase sur certains aspects nous a permis d'attirer l'attention sur ce qui avait attiré notre attention.

Texture. Yvon a utilisé une ligne brisée, de style staccato, pour symboliser la texture. J'ai rendu les décorations en bois en exagérant l'aspect viellot que donnent le temps et les intempéries. Nous avons tous deux traité la texture de manière différente parce que nous avons chacun notre style. La photo, cependant, n'a pas, comme nous, saisi l'impression de texture sur les surfaces.

L'ombre et la lumière. Dans une photographie, les parties ombragées sont habituellement reproduites plus foncées qu'elles ne le sont en réalité. De plus, la couleur et les valeurs y sont mal rendues. Par contre, en travaillant sur le motif, l'artiste peut voir avec plus de netteté dans l'ombre et choisir de reproduire cette partie à sa manière. J'ai choisi de rendre les sections ombragées assez foncées. Le rendu de Yvon, d'un autre côté, est plus lumineux et moins atténué.

Les influences du moment. Lorsque l'on dessine ou peint en plein air, la scène ne reste pas statique comme sur une photo. Ce que nous mettons sur le papier est influencé non seulement par notre expérience, ce que nous aimons ou n'aimons pas, mais par un mouvement constant et des changements sur le site même. Par exemple, à un certain moment, un camion s'est arrêté devant nous. Ensuite des passants ont conversé devant les escaliers. Nous aurions pu choisir d'inclure ces éléments dans nos dessins si nous l'avions souhaité.

Impressions et sentiments. Lorsque l'on travaille sur le site, tous nos sens sont stimulés. Le froid, la chaleur, le vent et les odeurs, par exemple, peuvent avoir une influence sur un croquis ou une peinture. Même la faim ou la soif peuvent avoir de l'effet sur l'artiste. D'un autre côté, si quelqu'un travaille toujours en utilisant des photos comme références sans la pratique du travail sur le motif, l'expérience sensorielle lui manque. Après quelques trente minutes, Yvon et moi sentions que c'était le moment de la pause café. Excellente idée, car elle nous a permis de ne pas gâcher nos dessins par des ajouts superflus.




De manière générale, la photo est utile pour enregistrer un mouvement rapide ou un détail. Par contre, le travail « in situ » permet de comprendre le sujet par une observation directe. Si nous décidons par la suite de reprendre le sujet en studio, ces croquis faits sur le motif vont nous remettre dans l'atmosphère du moment, nous faire revivre les impressions ressenties alors. À partir de croquis et de photos, le travail en studio nous rappelle aussi les bons moments passés avec un ami...

Note: L'édifice illustré ci-haut est situé au 1229, rue de la Montagne, à quelques pas au sud de la rue Ste-Catherine à Montréal. Le deuxième édifice, qu'on apperçoit ci-bas, a aussi été dessiné par les mêmes artises. Il s'agit de l'édifice Allan situé au 333, rue de la Commune Ouest.

Raynald Murphy sca



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